Habituellement, les figures sculptées qui ornent les façades des églises romanes sont situées tout en haut de l’édifice, sous la corniche sur laquelle s’appuie la charpente. L’abbaye de Murbach nous en offre une belle collection, réparties sur différentes hauteurs. Elles sont bien visibles depuis le pied de l’édifice et l’on peut s’interroger sur leur signification : quel est le rôle assigné à ces têtes grotesques qui ne peuvent avoir été installées sans l’aval de l’autorité religieuse ? Par exemple ce visage féminin recouvert d’une coiffe imposante et qui tire la langue à ceux qui s’apprêtent à pénétrer dans l’édifice… est-il autre chose qu’une simple provocation ? Il faut se rappeler que l’enseignement religieux des fidèles passait également par l’image peinte ou sculptée. Les représentations de personnages caricaturaux renvoient donc au mal qui guette les humains, sous toutes ses formes : méchanceté, idolâtrie, luxure… La prise de conscience de l’état de pécheur était un préalable à toute démarche pieuse. Aujourd’hui, on s’est affranchi de beaucoup d’interdits et la vue de cette sculpture ne nous culpabilise plus. Il n’empêche qu’elle peut nous rappeler tout le mal que l’on peut faire lorsqu’on n’arrive pas à tenir sa langue.
Murbach, le 10 janvier 23
